C’est l’effet domino. La commission européenne vient d’ouvrir une procédure disciplinaire contre la France pour « déficit public excessif ». Pierre Moscovici, premier Président de la Cour des comptes, alerte ce 15 juillet dans Les Échos sur la dégradation des finances publiques et l’impérieuse nécessité de réduire la dette de la France. Dans ce contexte, les dotations de l’État aux Régions se réduisent. Ce qui pousse ces dernières à réduire la voilure dans le cadre du budget 2025.
136 M€ en moins en 2024. D’après Carole Delga, présidente PS de la Région Occitanie, le gouvernement coupe 136 M€ pour la Région Occitanie en 2024 : 106 M€ de crédits supprimés, et 30 M€ de non compensation des surcoûts énergétiques demandée par Régions de France. « Le gouvernement a décidé, sans concertation ni préavis, d’amputer les budgets des collectivités, et en premier lieu celui des Régions. Pour autant, elles sont de plus en plus sollicitées pour contribuer au financement des investissements indispensables à le neutralité carbone et pour œuvrer pour le pouvoir d’achat des familles », déclare l’élue. Dans le détail : – 37,5 M€ de crédits Plan d’investissement dans les compétences, 26 M€ de minoration de recettes de TVA et 8 M€ de reversement au titre de 2023, – 19 M€ du fait de l’exonération totale des cartes grises de véhicules électriques, 8 M€ de reste à charge pour la TICPE, – 4,5 M€ liés à la suppression de la participation de l’Etat à l’exploitation de la ligne ferroviaire du Cévenol, baisse de 36 % du Fonds de soutien apprentissage (- 3,4 M€)… « Les Régions sont par ailleurs les seules collectivités à ne pas bénéficier de compensation de l’État pour faire face à l’inflation », souligne-t-elle.
Décentralisation, la solution ? Or, « dans cette crise que connaît notre pays, je pense que la décentralisation est une des solutions. C’est en donnant plus de moyens localement que l’on peut justement avoir une capacité de résilience et de réassurer la population ».
Capacité à agir « impactée ». « Les crédits de l’État sont amputés de plus de 210 M€ en deux ans, entre 2023 et 2024, déclare Carole Delga, le 11 juillet en assemblée plénière. Cela va impacter notre capacité à agir. Sinon, la collectivité s’endetterait trop. Nous n’avons plus la possibilité de compenser le désengagement de l’État. Je tiens à ce que l’on ait une situation financière saine. Il ne faut pas mettre la collectivité dans une zone de tension. En 2023, nous avions réussi à absorber une baisse de 73 M€ de l’État sur l’ensemble du budget. Maintenant, ce n’est plus tenable. » Elle s’étonne que « les engagements votés en loi de Finances ne soient pas respectés. C’est une décision inédite du gouvernement ».
Pistes d’économie. Dans ce contexte tendu, le budget 2025 sera marqué par la rigueur, prévient l’élue. Par exemple, les partenaires de la Région qui sont en bonne santé financière subiront « une baisse ponctuelle du montant des aides, sans pour autant appliquer des coupes brutales ». Le nombre de places achetées en formations professionnelles sera optimisé, « le chômage ayant diminué de 15 % au cours des dernières années ». Autre annonce, et non des moindres : la Région Occitanie « ne palliera plus les carences de l’État. La Région va rationaliser ses participations dans les organismes d’État, ainsi que ses participations au bénéfice de l’État (CPER Mobilités, etc.). Les désengagements de l’État en matière d’investissements ferroviaires ou de rénovation énergétique ne seront plus compensés ».
Le document de la Région Occitanie accessible en cliquant ici.
Une ambition sur l’IA. Ces annonces n’empêchent pas le financement d’actions. Ainsi, pour structurer la filière de l’IA en Occitanie, la Région adopte ce 11 juillet un Plan de 60 M€ pour la période 2024-2028, en veillant à encadrer les technologies, comme le stipule la stratégie numérique régionale, adoptée en novembre 2022. C’est ce qu’on appelle l’IA « de confiance », à la fois « acceptable, fiable, explicable, robuste et transparente ».
Le territoire ne manque pas d’atouts. Plus de 250 entreprises du numérique implantées ici, employant 3.500 salariés, proposent des produits ou services IA. Pour accélérer, 55 M€ vont être déployés sur 5 ans pour soutenir la recherche et la formation. 5 M€ seront par ailleurs consacrés à l’intégration de l’IA dans les services et les politiques publiques de la Région.
100 projets accompagnés. La Région entend accompagner 100 projets d’innovation, et doubler le nombre de création d’entreprises ‘deeptech’ (technologies de rupture) et le nombre d’étudiants, demandeurs d’emploi et salariés formés à ces nouvelles technologies, grâce à un levier budgétaire de 9 M€. Un mouvement déjà bien engagé. Par exemple, à Toulouse et Montpellier, quelque 6.200 étudiants ont suivi en 2023 des cursus en IA. Le document à lire en cliquant ici.
Nouveau Front Populaire : « Il faut rester lucide ». Interrogée sur la politique nationale, et la stratégie à pousser pour le Nouveau Front Populaire (NFP), l’ex-soutien de Manuel Valls à la primaire 2017 joue clairement la carte de la prudence programmatique. « Le NFP a un avantage, mais il faut rester lucide. Quand il manque près de 100 députés pour arriver à la majorité absolue, il faut être humble. Il nous faudra faire en sorte que les propositions soient votées, dans la Macronie. C’est un travail qui commence à être mené. La base du programme du NFP doit être maintenu, mais il faut une majorité. Sinon, les Français vont se demander si cela fonctionne bien en haut (sic). Il faut faire attention à ne pas être dans les postures. Sinon, on participe à l’accession au pouvoir de l’extrême-droite. Je ne veux pas désespérer le peuple, un peuple que je rencontre tous les jours sur le terrain, dans l’industrie, des charpentiers, des agents de maisons de retraite, des chefs d’entreprise… »
Ses fondamentaux. Parmi ses fondamentaux : « La revalorisation du Smic, l’abrogation de la loi Retraite, des moyens dans les énergies renouvelables, le retour à la semaine de 4,5 jours à l’école car il est nécessaire que les enfants passent plus de temps à l’école, l’investissement dans la sécurité et la formation des forces de l’ordre, à une période où l’insécurité prend de nouvelles formes, le projet européen. Pour combattre le désespoir, il faut un travail qui rémunère mieux. Je suis attachée à la valeur travail et au travail de valeur. »
« Macron n’assume pas ses responsabilités ». Delga, ex-secrétaire d’État (Commerce, Artisanat, Consommation et de l’Économie sociale et solidaire) en 2014 et 2015, ayant travaillé sous l’autorité de Macron quand ce dernier était à Bercy, juge la lettre aux Français du chef de l’État « vide. Le président de la République ne répond pas présent, n’assume pas ses responsabilités. C’est décevant pour les Français ».