La start-up Poligma (8 personnes, entre salariés et intervenants formateurs, CA de 400 k€, Montpellier), éditrice de la solution numérique Récit qui modélise les profils de chaque bureau de vote du territoire français, par profils socio-économiques (âge, diplômé, catégorie socio-professionnelle), vient de signer coup sur coup avec la Ville de Toulouse et la Région Sud-Paca, apprend-on auprès de Stéphane Boisson, son fondateur et président. Rencontre avec cet entrepreneur également prof d’éco au lycée Mermoz à Montpellier.
Toulouse : de la mobilité aux containers de dépôts. « Nous avons commencé à travailler avec le directeur de cabinet et la direction générale des territoires de la Ville de Toulouse (maire : Jean-Luc Moudenc, LR) pour aider, pendant trois ans, au pilotage des politiques publiques et des stratégies de communication », déclare-t-il aux Indiscrétions. La Ville de Toulouse a désormais accès à la plateforme de services développée par Poligma, avec 5.000 variables territoriales intégrées, « ce qui permet d’analyser chaque partie du territoire, chaque quartier ». La solution digitale fait parler les données, en croisant le statut d’occupation des logements, les catégories socio-professionnelles, les niveaux de revenus, les résultats électoraux par bureaux de vote… La collectivité peut aussi ajouter ses propres données, comme l’évolution des collectes sur les containers de dépôts volontaires (verres, papiers…) par rapport à l’évolution de la démographique dans le quartier concerné, ce qui peut déclencher des campagnes de sensibilisation ciblées. « Ce type de data permet d’affiner les politiques publiques au millimètre près », ajoute Stéphane Boisson, par ailleurs enseignant en économie, sociologie et sciences politiques au lycée Jean-Mermoz (Montpellier).
Autre exemple d’application : l’anticipation sur les crèches, quand la solution alerte sur l’augmentation de familles monoparentales dans un quartier. « Faute de quoi, la collectivité crée de la précarité, du fait de la difficulté à trouver un emploi quand il n’y a pas de crèche à proximité. »
Poligma intègre aussi les données de bornage de téléphones portables anonymisées sur les matrices de déplacements (origine et destination) par quartiers. « Ce qui est utile pour la définition fine des politiques publiques, en croisant avec les données de l’Insee par quartier sur les moyens de transport utilisés, et les données de fréquentation d’abonnements Tisséo (opérateur de transport de Toulouse, note). »
La possibilité de filtrage, par âge, sexe…, des listes électorales a aussi des applications de santé publique. Par exemple, via l’envoi d’un courrier uniquement aux personnes âgées, lorsque des épisodes de chaleur sont prévus, pour prévenir les risques de santé.
Région Sud : stratégies de webmarketing. Poligma vient de conclure avec la direction de la communication de la Région Sud/Paca (président : Renaud Muselier), son « plus gros contrat à ce jour, à six chiffres par an, sur une durée de trois ans », pour aider à l’élaboration des stratégies de webmarketing. « La Région Sud est passée par l’UGAP, Poligma étant entré dans le catalogue de produits de l’UGAP et devenant ainsi éligible à l’achat par les collectivités territoriales. Notre solution s’acquiert désormais sur étagère, facilement ».
« Très content de l’annonce de la dissolution de l’Assemblée nationale ! » Autres clients, la communauté urbaine de Dunkerque, ou pendant les élections européennes, pour le candidat socialiste Raphaël Glucksmann. Côté politique, Poligma travaille « de LFI jusqu’à la droite non-Ciottiste. Nous avons travaillé pour plusieurs équipes lors des législatives, un peu partout en France, l’idée étant de cibler les campagnes de communication par bureau de vote, par quartier, pour travailler notamment la mobilisation des électeurs. J’étais très content de l’annonce par Macron de la dissolution de l’Assemblée nationale ! », sourit Stéphane Boisson.
Nouvel axe de développement : l’acceptabilité territoriale des projets d’aménagement : autoroutes, contournement routier, projets éoliens offshore ou terrestres. « L’idée est de travailler auprès des populations, en prenant des indicateurs, pour évaluer les risques. Par exemple, les communes dans lesquelles le bloc électoral RN, Reconquête et droite dure est très présent vont être compliquées pour des aménageurs de parcs éoliens. Le porteur de projet peut croiser les données électorales avec l’ancienneté de résidence, la catégorie socio-professionnelle les niveaux de revenus, la structure d’âge de la population. Nous offrons aussi le moyen d’entrer en communication avec la population, pour faire preuve de pédagogie, assurer le suivi dans la durée, en expliquant l’évolution du projet pour éviter de mettre le feu au territoire. Ne pas communiquer sur un projet l’expose à des oppositions vives, sans parler de ceux qui peuvent instrumentaliser le projet sur un plan associatif ou politique, parce qu’ils ont un coup à jouer, par exemple aux municipales de 2026. Pour les projets d’éolien en mer, notre plateforme offre la possibilité de contacter toutes les données de marins-pêcheurs situés le long de la côte concernée. »
Municipales 2026 : comment mobiliser les électeurs. Son analyse en vue des municipales 2026 à Montpellier ? « La mobilisation des électeurs est un enjeu majeur. Dans la ville, 80.000 habitants de plus de 18 ans ne sont pas inscrits sur les listes électorales alors qu’ils pourraient l’être. Il y a des étudiants, mais pas uniquement. LFI est en train d’inscrire les étudiants sur les listes électorales, c’est leur stratégie. » Face à la poussée LFI observée à Montpellier lors des européennes et des municipales, l’enjeu, pour Michaël Delafosse, maire candidat à sa réélection, est de « recréer un lien avec des électeurs populaires qu’il est peut-être en train de perdre ». Même si les circonstances sont différentes : scrutins européen et national en 2024 / local en 2026, et contexte particulier de front républicain lors des législatives.
Quand les données parlent. Au Mail Nord (Mosson), 40 % des revenus disponibles proviennent des prestations sociales, contre 3 % dans le secteur Méric, déroule Stéphane Boisson, graphiques à l’appui. Le poids des revenus du patrimoine sur les revenus disponibles s’élève à 13 % à Méric, et 36 % avenue de Lodève.
Avec ZeCible. Poligma peut utiliser, via ses partenaires (comme ZeCible, à Poucharramet – 31, spécialiste de la délivrabilité des mails), 35 millions d’adresses mail et de téléphone en France, en conformité CNIL et RGPD. Avantage concurrentiel de la solution : « Poligma maîtrise la chaîne, de l’analyse en amont jusqu’à la délivrance du mail ou SMS, en passant par la location des numéros de téléphone et des adresses email », conclut Stéphane Boisson.