Bailleurs sociaux, associations d’insertion pour le logement (dont la Fondation Abbé Pierre), promoteurs immobiliers, intercommunalités, Région Occitanie, Départements, organisations financières, agences d’urbanisme, services de l’État… 300 professionnels publics, privés et associatifs du secteur de l’habitat se réunissent ce 8 décembre au centre de Congrès Diagora à Labège (31), à l’invitation du préfet de la région Occitanie Pierre-André Durand, pour les premières Assises régionales du logement.
Zan et rénovation énergétique. Ces Assises qui se tiennent en pleine crise du logement. Comment répondre aux besoins en logements alors que le Zan (zéro artificialisation nette) restreint les possibilités ? Comment impulser la rénovation thermique des logements tout en garantissant des logements pour tous ? Comment fluidifier le parcours résidentiel dans le parc social ? Voici les principaux thèmes qui seront abordés, entre 9h et 16h30. Sarah Nguyen Cao Khuong et Hubert Vialatte (Agencehv) auront le plaisir de coanimer cet événement. Quelques morceaux choisis, en avant-première.
Dynamique démographique. « Avec 40.000 nouveaux habitants chaque année (soit 800.000 nouveaux habitants à l’horizon 2040), l’Occitanie est très attractive, ce qui pose un enjeu de logements. La croissance est portée par les arrivées, et non par les naissances », indique Hervé Le Grand, directeur régional adjoint de l’Insee. Les nouveaux Occitans s’installent principalement « autour de Montpellier et Toulouse (jeunes actifs et étudiants), et sur la frange littorale (retraités principalement) ».
Davantage de résidences principales. Le nombre de logements par habitant augmente, du fait du phénomène de décohabitation. « En 20 ans, la population a augmenté de 9 % en Occitanie, alors que les résidences principales ont, elles, progressé de 15 %. »
Vague de seniors. En 2070, l’Insee projette « 800.000 seniors de plus et 100.000 jeunes de moins de 20 ans en moins. Ce qui n’est pas sans impact sur le logement : on ne loge pas de la même manière les jeunes et les seniors ».
Impact du réchauffement climatique. Les jours en excès de température seront plus nombreux, et concerneront « tout le littoral, les abords du canal du Midi et la Vallée de la Garonne, de Toulouse à Agen. Un habitat sur deux sera concerné. Cela suppose d’agir sur le confort d’été du parc de logements existants ».
Des déplacements domicile-travail de plus en plus longs. Autre cadre posé par l’expert : « Les déplacements domicile-travail se rallongent. 39 % des salariés faisaient plus de 10 kilomètres entre leur domicile et leur travail en 2013, ils sont aujourd’hui 43 %. Et 84 % d’entre eux prennent leur voiture. »
Secteur non délocalisable. « Le secteur du bâtiment est non délocalisable », rappelle Stéphanie Fourcade, directrice de la Cerc Occitanie. Le CA du bâtiment s’élève à 1,4 Md€ : 57 % sur l’entretien-rénovation, 31 % sur la construction neuve de logements et 12 % sur la construction neuve de locaux. Le nombre de logements mis en chantier chute : 41.000 en 2013, 32.300 en 2023. En 20 ans, les surfaces de logements se sont réduites. « On a perdu quasiment une pièce », résume-t-elle. Autre analyse : « Les logements collectifs concernent principalement l’Hérault et la Haute-Garonne, où se situent les deux métropoles. Dans les autres départements, les maisons individuelles sont majoritaires, et correspondent à une forte attente des ménages. »
Passer de la rénovation ‘par geste’ à la rénovation globale. Comment passer à des rénovations par geste (uniquement la menuiserie, ou uniquement le mode de chauffage…) à des rénovations énergétiques globales ? Comment séduire les investisseurs privés et comment convaincre les copropriétés ? L’appareil de production suivra-t-il ? Autant de thèmes qui seront également débattus.
Comme à l’hiver 54 ? « Beaucoup de collectivités ne sont pas assez bâtisseuses, lance Michel Calvo, président de Habitat Social en Occitanie (HSO, 62 bailleurs sociaux en Occitanie) et d’ACM Habitat. S’il n’y en a pas davantage rapidement, on va se retrouver dans 5 à 10 ans dans la situation de l’hiver 1954. Le public éligible au logement social croît de façon exponentielle et, en face, les bailleurs rencontres des difficultés de financements. » Il alerte sur l’exposition de l’ensemble du parc social (300.000 logements) aux situations caniculaires, de plus en plus fréquentes. « Lutter contre les grandes chaleurs est plus difficile que de lutter contre le froid », complète-t-il. Parmi les pistes d’actions, de petites ventilations et la double-orientation des logements. « Sur les 30 dernières années, on a fait peu d’appartements sociaux traversants », admet-il.
Les clés. Parmi les solutions exposées, les actions de la Banque des Territoires Occitanie : bonification des taux, renforcement des fonds propres des bailleurs par des campagnes de titres participatifs, l’accompagnement au dispositif ‘2e vie des bâtiments’ et l’achat massif de Vefa auprès de promoteurs immobiliers, via CDC Habitat, pour soutenir le secteur.
Ou encore, l’action volontariste de Montpellier Méditerranée Métropole et de la Fondation Abbé Pierre « pour aller inciter des propriétaires bailleurs à rénover leur logement, en fléchant le plus d’aides possibles. Cela permet de produire une réponse adaptée pour les ménages qui en ont le plus besoin », explique Sylvie Chamvoux, directrice régionale de la Fondation Abbé Pierre Occitanie. Elle pointe cependant un enjeu sur la défiscalisation, pas assez incitative selon elle : « C’est encore un blocage. Le fait, pour un propriétaire bailleur, de conventionner avec l’Anah, donne droit à une réduction d’impôt. Ce qui signifie que les propriétaires non imposables n’en bénéficient pas. Un système de crédit d’impôt permettrait à tous les propriétaires, imposables ou pas, d’en bénéficier. »
Le dispositif Rénov’Occitanie (Arec Occitanie) a, quant à lui, permis la réhabilitation de 245 copropriétés, pour 9.891 logements, avec un système de guichet unique. L’Arec Occitanie réalise ainsi un audit énergétique à taux réduit, octroie des prêts à taux bonifié, et dispose d’une caisse d’avance de subventions pour des ménages modestes et très modestes. « Les travaux permettent de réaliser 50 % d’économies d’énergie, glisse Raphaëlle Vienot, directrice générale adjointe de l’Arec. Mais il est souvent difficile de faire passer à l’acte des copropriétés, jugeant les travaux non prioritaires et d’un coût trop élevé. » L’enjeu de la montée en compétences des syndics de copropriété est crucial, pour que ces derniers « comprennent mieux l’intérêt des travaux de rénovation énergétique et de l’accompagnement par des bureaux d’études. À nous de montrer que les opérations sont finançables, en limitant au maximum le reste à charge ».
Challenge de l’habitat innovant. La veille au soir, le 7 décembre, se déroulent à l’Envol des Pionniers (Toulouse) les Challenges de l’Habitat Innovant, organisés par le Pôle Habitat FFB Occitanie (présidente : Céline Torres). Plusieurs adhérents d’Occitanie participent : Maisons Vertes de l’Aude (Narbonne), Gilles Fages Architecte et Constructeur (Sigean), Maisons Abadie (Balma), Maisons Ariane (Florens), Ami Bois (Toulouse), Envol (Montpellier, groupe Hectare) et Hectare (Vendargues). Sur 25 dossiers nationaux, 7 dossiers sont issus de l’Occitanie.