« Les défis industriels et environnementaux »: voici le thème des 20 ans du Cycle des Hautes Études pour le Développement Économique – CHEDE, ce 24 novembre au Ministère de l’Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique. Avec des tables rondes « Quelles solutions pour limiter l’impact de l’être humain sur son environnement ? » et « Les enjeux de la réindustrialisation verte en France », en présence d’environ 300 anciens et actuels auditeurs du Chede.
Parmi les alertes lancées, celles de Mathilde Dupré, directrice de l’Institut Veblen pour les réformes économiques : « Des secteurs réalisent des progrès dans la performance énergétique, notamment l’aéronautique et l’automobile. Mais, en face, il y a une explosion de la consommation. Par exemple, dans l’aviation, l’énergie consommée par un passager a été divisée par deux en 30 ans, mais le trafic aérien a été multiplié par 4,6. Les efforts produits sont annulés par les usages. »
Autre piqûre de rappel : « Depuis 150 ans, les sources d’énergie se superposent. On ne se débarrasse pas de celles qui précédaient. L’enjeu de l’électrification de l’économie ne doit pas faire oublier la nécessité de réduire la consommation d’énergie. » Selon elle, « les politiques publiques doivent organiser la sobriété, en matière de mobilités alternatives, d’organisation du travail… »
Sur l’antagonisme croissance/fin du monde, la philosophe Catherine Larrère a rappelé : « Si nous vivions tous sur terre comme les Américains, il faudrait 4 planètes ; Comme des Européens, il faudrait 2 planètes. Mais on n’en a qu’une. Il y a du mal à prendre les questions à bras le corps. Les économistes et les écologues n’ont pas la même approche. » Cela dit, une gouvernance mondiale est, selon elle et s’inspirant de Montesquieu, peu souhaitable. « Plus on monte en gouvernance globale, plus on perd en démocratie. Un gouvernement mondial serait forcément autoritaire. »
Comment financer la trajectoire de neutralité carbone ? Après la parution du rapport Pisani-Mahfouz (66 Md€ d’investissements supplémentaires par an pour financer la neutralité carbone), Benoît Leguet (I4CE) questionne : « Comment l’État fera-t-il pour financer la trajectoire qu’il s’est lui-même fixée ? À l’échelle européenne, si quelqu’un peut me dire qui rédige, à la Commission européenne, le financement du Green Deal, je lui offre le champagne. »
Point positif : « La présentation, chaque année devant le Parlement, d’une stratégie de financement pluriannuelle de la transition écologique. Cela va permettre aux industriels d’anticiper les marchés en devenir. C’est même à se demander comment on faisait avant ! »
Incohérence. Philippe Chalmin a pointé des incohérences entre nos modes de consommation, prédateurs en matière de minerais rares, et nos propres capacités de production en Europe. « La France affiche 10 % d’indépendance en matière d’extraction, 15 % en matière de recyclage, 40 % en termes de transformation, sur les minerais stratégiques. Nous avons donc une dépendance vis-à-vis des pays producteurs. Certains sont sympathiques, comme le Chili, d’autres un peu moins, comme la République démocratique du Congo ou la Chine. »
Airbus : d’abord les carburants alternatifs. Pour Philippe Coq, directeur des affaires publiques d’Airbus, la priorité est aux carburants durables. « La prochaine génération d’avions pourra voler avec 100 % de carburant durable. » L’effort de l’État est selon lui encore insuffisant. « 200 M€ sont fléchés sur ces carburants dans le cadre de France 2030, et ne sont toujours pas affectés. Certes, il faut aussi aller sur l’hydrogène vert, mais les choses ne sont pas tranchées aujourd’hui. »
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