Alors que sont lancés, ce 7 mai, les travaux de l’aménagement ferroviaire au nord de Toulouse (AFNT), maillon du projet ferroviaire GPSO (LGV Bordeaux-Toulouse), l’équipe du projet LNMP (ligne nouvelle Montpellier-Perpignan) a tenu un séminaire presse, le 30 avril à Montpellier.
Un voyage de 2h30. 2,04 Md€ d’investissement pour le 1er tronçon entre Montpellier et Béziers (prévu pour 2034, démarrage des travaux en 2029), 18 communes traversées, 3 raccordements au réseau existant, une sous-station électrique à Lattes-La Castelle, 120 ouvrages d’art, 900 hectares de surface de travaux, 18 viaducs, une base travaux à Bessan/Saint-Thibéry, 52 km de ligne nouvelle, 7 km de raccordements, 700.000 voyageurs supplémentaires, capacité d’enlever 20.000 poids lourds par an de l’autoroute A9, 18 mn de gagnées entre Béziers et Montpellier en TGV, mixité totale de la future ligne (300 km/h pour les trains de voyageurs, 120 km/h pour les trains de fret)… Stéphane Lubrano, directeur de la mission LNMP (ligne nouvelle Montpellier-Perpignan), est revenu aux côtés de son équipe sur les grands axes du projet, lors d’un séminaire presse qui a passionné les confrères présents (2h30 d’échanges, un record). L’assistance à maîtrise d’ouvrage est confiée à Setec. Le projet sera réalisé à travers un marché de conception-réalisation, faisant l’objet d’un dialogue compétitif (relire Les Indiscrétions du 25 mars, en cliquant ici).
Fonds européens pas acquis. Présente aux Connecting Europe Days à Bruxelles, début avril, l’équipe de LNMP a fait son lobbying, aux côtés de la Région Occitanie, chef de file des collectivités locales financeurs, pour les 20 % de financements européens. « À partir de 2028, il y a une incertitude sur le budget de l’Union européenne. L’UE ne s’engage jamais sur un projet par anticipation. Elle est très attentive à la maturité des projets, et à leur capacité à attirer des cofinanceurs. L’Europe souhaite que 100 % de ses crédits soient effectivement consommés. Or, dans le passé, elle a pu financer des projets qui n’ont pas abouti. Par ailleurs, les projets ferroviaires sont en concurrence. » Plusieurs signaux, néanmoins, sont positifs : Iveta Radičová, coordinatrice du corridor méditerranéen à la Commission européenne,« nous a elle-même demandé de déposer un dossier de subvention (pour un montant de 22,5 M€), ce qui prouve qu’elle porte ce corridor ferroviaire européen », analyse Stéphane Lubrano. À l’échelle nationale, le projet est jugé prioritaire « dans la Loi d’Orientation des Mobilités, s’inscrit dans la stratégie bas carbone et dans la Loi Climat&Résilience ».
Deux enquêtes publiques. Deux enquêtes publiques sont à venir : autorisation environnementale des interventions préparatoires (fin 2024) et autorisation environnementale LNMP phase 1 (2027).
« Impossible de satisfaire tout le monde ». Interrogé sur les points sensibles traversés, comme le vignoble de Picpoul de Pinet ou le Massif de la Gardiole, Stéphane Lubrano n’a pas nié « l’impact visuel du projet, notamment du futur viaduc de Poussan (pour lequel un concours d’architecture va être lancé), haut d’environ 26 mètres. Techniquement, on ne peut pas passer ailleurs. »
Le technicien a aussi, à bon escient, rappelé la définition de l’utilité publique d’un projet – le tronçon Montpellier-Béziers est déclaré d’utilité publique depuis le 16 février 2023. « Un projet déclaré d’utilité publique ne veut pas dire qu’il correspond à une somme d’intérêts individuels. Il est impossible d’avoir un tracé qui satisfasse tout le monde ».
Démarche HQE. Le chantier s’inscrira dans une démarche HQE Infrastructures Durables. « Ce sera la première LGV en France certifiée ainsi. Cette démarche pilotera l’écoconception de la ligne. Des efforts seront faits pour limiter l’impact de la ligne sur l’environnement : activités agricoles, zones humides, biodiversité, paysages, bruit… »
« Délais incompressibles ». Interrogé par Les Indiscrétions sur la possibilité d’aller plus vite, Stéphane Lubrano estime l’échéance de 2034 comme incompressible. « Il faut établir le cahier des charges pour figer le projet, lancer un dialogue compétitif, obtenir les procédures d’autorisations, notamment l’autorisation environnementale, qui demande à travailler les mesures compensatoires à mettre en place… »
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Phase 2 mixte ? En parallèle, l’équipe LNMP de SNCF Réseau se projette aussi sur la suite, à savoir la ligne Béziers-Perpignan, un projet deux fois plus important que la phase 1 (100 km au lieu de 50 km, 4 Md€ au lieu de 2 Md€). Elle va notamment interroger une éventuelle mixité du futur tronçon Béziers-Perpignan (mise en service au mieux en 2040). Pour l’instant, ce tronçon est dédié au seul trafic voyageurs. « Les partenaires financiers (collectivités locales notamment) poussent pour qu’on requestionne une éventuelle mixité, au regard des nouveaux enjeux environnementaux. L’Europe aussi se questionne. Mais quelle sera l’augmentation du trafic fret ? Et si la route se décarbone, quelles seront les nouvelles modalités de calcul ? Sans oublier le surcoût de la mixité, d’environ 2 Md€ », prévient Stéphane Lubrano. Des groupes de travail thématiques se dérouleront d’ici à la fin de l’année. Les thèmes sont en train d’être arrêtés : desserte, gare nouvelle, environnement, étude de trafics, impact sur l’agriculture… « Nous allons prendre le pouls des thèmes dans les territoires, pour alimenter nos études. Ce que l’on peut penser secondaire, peut être en fait important pour le territoire. »