La pression deviendrait presque irrespirable. L’étau sociétal se resserre sur le conducteur d’un deux roues motorisés. Des gestes énervés de cyclistes énervants, des conducteurs dont il faut anticiper les courbes – le téléphone pas si intelligent que ça ne doit pas être loin -, des policiers qui guettent le moindre faux-pas – un stop glissé, 100 mètres sur une plateforme de tramway etc. Ne soyons pas injustes avec les forces de l’ordre. Certains agents font preuve de discernement. Leur aptitude au dialogue m’a fait économiser en dix ans des centaines d’euros d’amendes et .. (biiiiiip) points sur mon permis. À croire qu’il suffit d’être aimable, de couper le moteur avant qu’ils ne le demandent et d’avoir des papiers en règle, pour bénéficier d’une forme d’immunité et reprendre son chemin avec un simple sermon verbal.
La pression deviendrait presque irrespirable, mais c’est quand même bien pratique, cet engin pétaradant du diable. Le temps de parcours est garanti d’un point A à un point B (enfin, si on arrive vivant au point B). Une sorte de miracle répété chaque jour, dans une métropole en travaux perpétuels. Des travaux qui, du coup, ne me dérangent pas plus que ça. Ils sont même plutôt esthétiques et instructifs. En attendant le feu vert, j’observe à travers la visière du casque les gars des travaux publics creuser, terrasser, tirer et poser, pour une ligne de tramway, de véloligne ou de bustram. Il y a une forme de poésie urbaine dans cette transformation de la ville.
Mais avec cette pression verte, vais-je donc passer à la trappe électrique ? Eh bien non. Pas encore. C’est trop cher, trop dans l’injonction, trop dans le prévisible. Je m’y mettrai quand la question n’intéressera plus personne, et, surtout, qu’il y aura des bornes de recharge partout. Pour l’instant, j’aime les odeurs d’essence, les taxes surnaturelles et les confiseries écœurantes qui embaument les stations-services. Ah, le charme irrésistible des pleins de Super à 23h, dans le vent qui mord et l’éclairage poisseux, en essayant de viser le réservoir du 125 Honda ! On s’en fout… partout.