« Inciter les start-ups à mener une étude de marché »
Dans une tribune publiée dans la lettre d’information externe de Capitole Angels, Pierre Carli, président de cette association de business angels d’Occitanie Ouest, décrypte, chiffres à l’appui, un manque de crédibilité des business plans des start-up. On a retravaillé son texte en « Trois questions à », et on est sûrs qu’il ne nous en voudra pas.
Pierre, quel regard portes-tu sur les business plans ?
Les business plans des start-ups sont, quasi systématiquement, beaucoup trop optimistes, voire complètement utopistes. Dès la première année, le CA réalisé est 4 à 5 fois plus faible que prévu, selon une étude a posteriori réalisée il y a quelques années par Melies, le réseau des Business Angels d’Occitanie Ouest, sur 14 projets, a conclu que, en moyenne. Et, en année N+3, il est 6 fois inférieur au niveau affiché dans le business plan.
Comment expliques-tu ce grand écart ?
Une autre analyse menée par Capitole Angels sur les dossiers reçus en 2022 et 2023 montre que, sur 440 projets déposés, un seul (!) a fait l’objet d’une étude de marché réalisée par un cabinet spécialisé. Dans bien des cas, il est évident qu’une étude de marché aurait permis une meilleure prévision du CA et aurait aidé à anticiper les difficultés de commercialisation du produit ou service.
Quel est ton message, à la fois aux start-ups et à l’écosystème ?
Bien qu’il soit possible de lancer une start-up sans étude préalable, cela comporte des risques. Une compréhension approfondie du marché peut augmenter significativement les chances de succès. Si une étude de marché complète n’est pas réalisable, il est crucial de trouver des alternatives pour obtenir des informations pertinentes et minimiser les risques. Il est donc important de comprendre pourquoi il est essentiel de réaliser une véritable étude de marché et pourquoi si peu de start-ups y ont recours. Je vous renvoie à l’article complet publié par Capitole Angels sur LinkedIn (lire en cliquant là).
L’ensemble des acteurs de l’écosystème des start-ups (Bpifrance, la Région Occitanie, les FrenchTech, les incubateurs, pépinières, octroyeurs de prêts d’honneur, banquiers…) doit se mobiliser pour inciter les start-ups à mener une étude de marché dès que possible, et en tout cas avant de lancer leur première levée de fonds. Certes, une étude a un coût, compris entre 10 et 20 K€. Il est peut-être nécessaire de mieux faire connaître la possibilité de solliciter Bpifrance. Le dispositif de Bpifrance, nommé « Diagnostic axes d’innovation », est destiné aux PME ou ETI de moins de 2.000 employés cherchant à innover. Il peut financer une prestation d’étude de marché, couvrant un montant maximum de 16 000 € TTC, avec une prise en charge de 50 % par Bpifrance. Il serait également judicieux que les organismes qui octroient des prêts d’honneur (Créalia, Réseau Entreprendre, Réseau HGI, etc.) fassent de la réalisation d’une étude de marché une condition suspensive à l’octroi de leur aide. En résumé, dépenser 20.000 € est sûrement moins coûteux pour les fondateurs et leurs partenaires qu’un échec au bout de 12 à 24 mois. Cela donne surtout plus de chances d’évaluer et d’anticiper les difficultés de commercialisation que la quasi-totalité des start-ups rencontre.